L’Association canadienne des producteurs d’acier (ACPA)

Budget 2012

Présentation au Comité permanent des finances (FINA) de la Chambre des communes

Le 12 août 2011


Résumé

L’industrie sidérurgique canadienne est au cœur de l’assise manufacturière du Canada et fait partie intégrante des grappes industrielles et des chaînes d’approvisionnement de nombreux secteurs, notamment ceux de l’automobile, de la fabrication de pointe, de l’énergie, de la construction et des ressources naturelles. L’amélioration de la compétitivité de l’ensemble du secteur de la fabrication est essentielle au succès durable de l’industrie sidérurgique canadienne. Les gouvernements doivent mettre l’accent sur des politiques, des mesures fiscales, des programmes et des règlements qui stimulent la capacité concurrentielle du secteur industriel canadien. En adoptant une position favorable au secteur de la fabrication dans la prise de décisions en matière de politiques et de programmes et en aidant le secteur sidérurgique et les autres secteurs de la fabrication à innover, à accroître leur rendement et à améliorer leur performance environnementale, les gouvernements peuvent renforcer la capacité concurrentielle des fabricants canadiens à conquérir des marchés et à attirer des investissements, ce qui leur permettra de créer et de conserver des emplois bien rémunérés.

Le Comité permanent des finances a invité les intéressés à proposer trois priorités à aborder dans le cadre du budget fédéral de 2012. L’Association canadienne des producteurs d’acier (ACPA) lui présente donc les recommandations suivantes :

  1. Ajouter au moins cinq années supplémentaires à la période de prolongation de la déduction pour amortissement accéléré (DAA), qui est actuellement de deux ans, afin de stimuler la productivité et la capacité d’innover dans le secteur industriel canadien. Si le gouvernement faisait de la DAA une mesure applicable à long terme ou, mieux encore, une mesure permanente, la politique fiscale s’harmoniserait mieux avec la prise de décisions en matière d’investissement et avec les cycles de fabrication. Cela donnerait en outre au Canada un avantage qui lui permettrait d’attirer les futurs investissements sans lesquels nous ne pouvons assurer la capacité concurrentielle du secteur industriel.
  2. Améliorer la possibilité d’appliquer le crédit d’impôt à la recherche scientifique et au développement expérimental (RSDE) au secteur industriel en en modifiant la portée et les conditions d’admissibilité, en simplifiant le processus de présentation des demandes et en rendant le processus de demande de remboursement plus prévisible. Les crédits à la RSDE devraient être entièrement remboursables à toutes les entreprises qui effectuent des travaux de RD admissibles au Canada.
  3. Dans le cadre du processus d’examen de ses dépenses, le gouvernement doit conserver les ressources nécessaires à l’exécution des programmes et des activités qui contribuent à renforcer le secteur canadien de la fabrication, comme l’application des lois canadiennes sur les recours commerciaux par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), les efforts déployés par les conseils sectoriels (RHDCC) pour combler les pénuries de main-d’œuvre industrielle et le financement des infrastructures physiques destiné à améliorer l’efficience du réseau de transport et à répondre à d’autres besoins sociétaux.

Introduction

L’Association canadienne des producteurs d’acier (ACPA) se réjouit de pouvoir donner son avis au Comité permanent des finances dans le cadre des consultations prébudgétaires. L’ACPA est l’association industrielle nationale qui représente les producteurs canadiens d’acier primaire et de tuyaux en acier.

L’industrie sidérurgique canadienne emploie quelque 25 000 Canadiens, est responsable de 100 000 emplois dérivés, et ses ventes annuelles atteignent entre 12 et 14 milliards de dollars. Avec des aciéries dans cinq provinces et des activités connexes dans plusieurs autres, l’industrie sidérurgique est une composante essentielle du secteur canadien de la fabrication, à l’échelle nationale. On estime en effet que plus de 75 % des produits fabriqués contiennent de l’acier.

L’industrie sidérurgique fait partie intégrante des principales grappes industrielles canadiennes, notamment celles de l’automobile, de la fabrication de pointe, de l’énergie, de la construction et des ressources naturelles. Elle est essentielle à plusieurs chaînes d’approvisionnement, dont celle du Canada; aux industries en amont, comme l’industrie minière et celle du transport; et à l’infrastructure moderne qui permet au Canada de prospérer. Les techniques sidérurgiques de pointe sont également indispensables à l’amélioration de notre performance environnementale, qu’il s’agisse de fabriquer des voitures plus légères et plus économiques en essence ou d’exploiter de nouvelles sources d’énergie.  

Compte tenu de ces nombreuses interdépendances industrielles, l’ACPA demande l’adoption de politiques favorables au secteur de la fabrication destinées à renforcer l’ensemble de l’assise manufacturière canadienne. Les fabricants canadiens font face à une pression intense et à une concurrence sans cesse plus vive au sein de l’économie mondiale, tant au pays qu’à l’étranger. Ces pressions sont en outre exacerbées par des taux de change élevés qui imposent des difficultés supplémentaires aux secteurs tributaires du commerce, comme celui de la sidérurgie, face à leurs concurrents étrangers. Pour permettre aux fabricants canadiens d’affronter la concurrence dans le marché d’aujourd’hui, et pour stimuler de futurs investissements en capital, il faut disposer de politiques qui renforcent la capacité des fabricants à innover et à améliorer leur rendement et leur performance environnementale.

L’ACPA se réjouit des mesures prises en ce sens, notamment de la réduction prévue de l’impôt des sociétés et de la prolongation de la période d’application de la déduction pour amortissement accéléré (DAA) annoncées dans le budget de 2011. Il s’agit là d’engagements très importants mais, en raison des pressions incessantes exercées par les concurrents étrangers, des nouvelles incertitudes quant à l’économie mondiale et du taux de change du dollar canadien, il faut y ajouter d’autres mesures. Le gouvernement doit faire davantage pour stimuler le développement industriel et la croissance, en adoptant des politiques favorables au secteur manufacturier qui contribueront à assurer la prospérité des secteurs économiques à valeur ajoutée du Canada. C’est dans ce contexte que l’ACPA présente respectueusement ses priorités au Comité permanent des finances.

Recommandation

  1. Ajouter au moins cinq années supplémentaires à la période de prolongation de la déduction pour amortissement accéléré (DAA), qui est actuellement de deux ans, afin de stimuler la productivité et la capacité d’innover dans le secteur industriel canadien. Si le gouvernement faisait de la DAA une mesure applicable à long terme ou, mieux encore, une mesure permanente, la politique fiscale s’harmoniserait mieux avec la prise de décisions en matière d’investissement et avec les cycles de fabrication. Cela donnerait en outre au Canada un avantage qui lui permettrait d’attirer les futurs investissements sans lesquels nous ne pouvons assurer la capacité concurrentielle du secteur industriel.

La prolongation de deux ans de la DAA annoncée dans le budget de 2011 est une mesure positive qui a reçu un accueil favorable. La DDA accélère le taux d’amortissement du nouveau matériel, ce qui accroît le taux de rendement des investissements en modifiant les mouvements de trésorerie liés à la réalisation d’un projet. Cette mesure contribue pour beaucoup à faire en sorte que les nouveaux investissements des entreprises atteignent le « taux de rendement minimal ». Cependant, cette mesure n’est efficace que pour les grandes entreprises qui fonctionnent selon un cycle pluriannuel de planification de l’investissement et qui sont en concurrence directe ou indirecte dans leur recherche de nouveaux investissements. La période de prolongation de deux ans de la DAA est trop courte, compte tenu du temps considérable qu’exigent la planification, l’élaboration et la mise en œuvre de projets d’investissement majeurs dans les technologies et les processus de pointe par les entreprises. Si la DAA était en vigueur pendant une plus longue période, ce problème serait corrigé et le secteur industriel canadien serait avantagé par rapport à ses concurrents dans la recherche de nouveaux investissements.   

Du point de vue de l’intérêt public, il est important de souligner deux des caractéristiques positives de notre proposition concernant la DAA. En premier lieu, elle n’a pas pour effet d’augmenter le montant total de l’amortissement aux fins de l’impôt de quelque investissement que ce soit; elle ne fait qu’accélérer le rythme de cet amortissement. Si le montant de l’amortissement total réclamé augmente, ce ne peut être que parce que la DAA attire de nouveaux investissements dans les entreprises de fabrication canadiennes, un objectif de croissance et d’amélioration de la productivité que poursuivent aussi bien le gouvernement que le secteur industriel. En deuxième lieu, en élargissant la portée de la DAA, on éviterait d’avoir à déterminer quels secteurs ou quelles entreprises sont des « gagnants » ou des « perdants »; toute entreprise qui ferait de nouveaux investissements en vue d’améliorer la productivité et la capacité industrielle du Canada, dans quelque secteur que ce soit, pourrait profiter des avantages de la DAA.


Recommandation

  1. Améliorer la possibilité d’appliquer le crédit d’impôt à la recherche scientifique et au développement expérimental (RSDE) au secteur industriel en en modifiant la portée et les conditions d’admissibilité, en simplifiant le processus de présentation des demandes et en rendant le processus de demande de remboursement plus prévisible. Les crédits à la RSDE devraient être entièrement remboursables à toutes les entreprises qui effectuent des travaux de RD admissibles au Canada.

Le principal outil stratégique à large portée qui incite le secteur privé à réaliser des travaux de RD est le Crédit d’impôt à la RSDE. Un groupe d’experts présidé par monsieur Thomas Jenkins examine actuellement le programme de la RSDE et présentera bientôt ses conclusions au ministre d’État chargé des Sciences et de la Technologie. Lorsqu’il prendra connaissance du rapport du groupe d’experts, le gouvernement devra mettre en œuvre certains changements afin d’améliorer l’efficacité du programme de la RSDE et de faire en sorte que les Canadiens réalisent davantage de RD industrielle à orientation commerciale. Il faudra corriger certaines des faiblesses relevées dans l’administration du programme de la RSDE sans perdre de vue cet objectif essentiel. Le Comité permanent des finances devrait promouvoir cette position dans ses propres recommandations.  

Dans sa présentation au groupe d’experts présidé par Monsieur Jenkins, l’ACPA a fait des recommandations fondées sur un certain nombre de principes. En particulier, le programme de la RSDE doit :

  • avoir une incidence très importante pour l'entreprise qui effectue la recherche;
  • être capable de soutenir la concurrence de compétences concurrentes à l’égard de travaux  RD semblables;
  • avoir une portée suffisamment large pour englober un grand nombre d’activités précommerciales et de processus connexes;
  • être entièrement remboursable à qui réalise la RD, même pendant les exercices où l’entreprise paie peu ou pas d'impôt sur le revenu;
  • comprendre des processus de présentation des demandes et de demande de remboursement rapides et efficaces;
  • être raisonnablement prévisible pour le demandeur.

L’ACPA a commenté de façon détaillée ces différents principes lorsqu’elle a rencontré les membres du groupe d’experts et il lui ferait plaisir de transmettre ses commentaires détaillés au Comité permanent des finances. 

Récemment, l’Agence du revenu du Canada (ARC) a pris des mesures qui auront pour effet de réduire la portée du programme sur la RSDE. Ces changements vont à l’encontre des principes susmentionnés. Il faut attendre que le groupe d’experts présidé par Thomas Jenkins termine ses travaux, que le gouvernement examine attentivement les recommandations définitives de ces experts et qu’il prenne en compte les commentaires du Comité permanent des finances et ceux des industriels touchés par le programme sur la RSDE avant d’y apporter des changements importants. 

Recommandation

  1. Dans le cadre du processus d’examen de ses dépenses, le gouvernement doit conserver les ressources nécessaires à l’exécution des programmes et des activités qui contribuent à renforcer le secteur canadien de la fabrication, comme l’application des lois canadiennes sur les recours commerciaux par l’Agence des services frontaliers du Canada (ASFC), les efforts déployés par les conseils sectoriels (RHDCC) pour combler les pénuries de main-d’œuvre industrielle et le financement des infrastructures physiques destiné à améliorer l’efficience du réseau de transport et à répondre à d’autres besoins sociétaux.

Au moment où le gouvernement s’apprête à réduire ses dépenses, il est important, dans le cadre de ce processus et des décisions qui en découleront, de conserver les ressources nécessaires à l’exécution des programmes et des activités qui assurent la bonne santé du secteur de la fabrication au Canada. L’application de ce principe à l’examen des programmes de dépenses est un élément essentiel d’une position de principe favorable au secteur de la fabrication. Du point de vue de l’industrie sidérurgique, les trois programmes et fonctions à conserver sont les suivants :

  • Agence des services frontaliers du Canada (ASFC) – Application des lois sur les recours commerciaux

En tant que nation au système commercial ouvert, le Canada doit clairement faire savoir qu’il exige l’observation des lois portant sur les recours commerciaux afin d’assurer une concurrence fondée sur les lois du marché. De manière générale, l’industrie sidérurgique est particulièrement exposée aux déséquilibres structurels et à la surcapacité, en grande partie en raison de politiques gouvernementales étrangères qui offrent de multiples formes de soutien hors marché à ses concurrents, notamment des subventions directes et indirectes, du financement provenant de l’État, la nationalisation d’entreprises et les restrictions imposées aux exportations de matières premières essentielles. Cette aide gouvernementale est particulièrement importante dans le cas de la Chine, qui est grosso modo responsable de la moitié de la production mondiale d’acier. La Chine applique un vaste éventail de mesures que le Canada, les États-Unis, l’Union européenne et divers autres pays ont fréquemment contestées, avec succès, en vertu des règles de l’Organisation mondiale du commerce.

Les importations subventionnées ou faisant l’objet de dumping menacent la production nationale et font perdre des emplois à valeur élevée. Si l’on ne réussit pas à contrer efficacement de telles pratiques, le Canada perdra de son pouvoir d’attirer des investissements. Or l’ASFC joue un rôle crucial dans l’application des lois sur les recours commerciaux, qui exige des enquêtes approfondies, dans le respect des procédures établies, et peut mener à l’imposition de droits antidumping et compensateurs. L’ASFC doit également, de plus en plus souvent, s’attaquer à la fraude douanière et au contournement des règles douanières. Elle a besoin des ressources nécessaires pour accomplir ces rôles essentiels, afin que les entreprises canadiennes puissent affronter la concurrence dans des conditions équitables, créer des emplois et des revenus et participer à la croissance économique du pays.

  • Conseils sectoriels (RHDCC)

Les entreprises font face à un double défi : remplacer les personnes qui quittent le marché de l’emploi pour prendre leur retraite, et former une main-d’œuvre qui doit être de plus en plus qualifiée pour répondre aux exigences sans cesse plus élevées du secteur de la fabrication de pointe. Le Conseil canadien du commerce et de l'emploi dans la sidérurgie (CCCES), un conseil sectoriel codirigé par des entreprises et par le Syndicat canadien des métallurgistes unis d'Amérique, a récemment réalisé une étude d’envergure selon laquelle l’ensemble du secteur sidérurgique canadien devra embaucher 29 000 nouveaux employés, dont plus de 10 000 travailleurs spécialisés.

Depuis plusieurs années, le CCCES déploie des efforts considérables pour soutenir la planification des ressources humaines au niveau sectoriel et élaborer des initiatives de formation conjointes. Des décisions récentes concernant son financement entraîneront des changements notables dans les activités du CCCES. Si des modifications doivent être apportées au Programme des conseils sectoriels, il est important de le faire tout en conservant les grandes initiatives qui répondent aux besoins du secteur, sans lui imposer de coûts supplémentaires en matière d’élaboration de cours.  

  • Dépenses d’infrastructure

Le transport des produits canadiens vers différents marchés, au Canada et à l’étranger, exige une infrastructure de premier ordre et des systèmes de transport concurrentiels. La mise à niveau et la modernisation des systèmes d’infrastructure sont également avantageuses sur le plan environnemental. D’autres éléments d’infrastructure publique, comme les systèmes de distribution d’eau, répondent à d’importants besoins sociaux. Enfin, le rendement économique du Canada est tributaire d’investissements solides et continus destinés à renouveler et à étendre le réseau d’infrastructure du pays. 

Plus de la moitié des éléments d’infrastructure canadiens datent d’il y a plus de 40 ans et les besoins dans ce domaine ont été évalués à plus de 200 milliards de dollars il y a environ 5 ans. Le gouvernement fédéral a pris d’importants engagements pluriannuels afin de combler une partie de ces besoins, dont certaines ententes de partage des recettes avec des municipalités. Il faut continuer à soutenir les travaux d’infrastructure, que ce soit directement ou dans le cadre d’ententes de partage des coûts, pour contribuer à combler les importants besoins financiers liés à l’entretien et à la construction de routes, de ponts, de réseaux énergétiques, de ports et d’autres infrastructures, notamment dans les municipalités.

Conclusion

L’industrie sidérurgique fait partie intégrante de l’économie canadienne. Le rendement de l’ensemble du secteur de la fabrication et celui de l’industrie sidérurgique sont étroitement liés puisque les racines de l’arbre industriel plongent dans l’acier et que l’industrie sidérurgique est indissociable des grandes grappes industrielles et chaînes d’approvisionnement, et l’un des principaux clients des industries en amont. Les politiques publiques destinées à renforcer l’assise industrielle du pays sont de toute première importance pour l’emploi et la croissance dans le secteur sidérurgique canadien.

Les producteurs d’acier canadiens demandent l’adoption de politiques budgétaires qui leur permettront, ainsi qu’à leurs clients, de faire face à la concurrence mondiale dans la recherche de marchés et d’investissements. L’ACPA préconise l’adoption de mesures en matière de fiscalité et de dépenses qui soient favorables au secteur de la fabrication et de nature à le rendre plus concurrentiel. Il est essentiel de disposer d’un tel programme pour attirer des investissements, donner des emplois de haute valeur aux Canadiens et créer davantage d’entreprises productrices de valeur ajoutée, aujourd’hui et pendant longtemps encore. C’est avec plaisir que l’ACPA recommande des mesures précises au Comité permanent des finances, tout en le priant de les promouvoir à son tour afin d’améliorer la performance industrielle du Canada et ce de manière responsable sur le plan financier.